Hier g.p était au fond de son lit.
La première prise de sang dont je me souviens ne date pas d’hier. Déjà dans la salle d’attente du dispensaire, tous les gosses du quartier accompagnés de leur maman étaient collés à elles comme s’ils sentaient qu’il y avait du danger. De la pièce d’à côté nous parvenaient des cris et des pleurs qui ne présageaient rien de bon. Quand vint mon tour, ma mère me tira de force dans la salle de soins. Une bonne soeur habillée d’une longue robe bleue et portant une cornette me fit un large sourire. Elle n’avait pas l’air désagréable et pourtant c’était elle le bourreau de service. Elle me fit asseoir sur un semblant de fauteuil et me ligota le bras. Puis pour me faire penser à autre chose qu’à cette terrible épreuve qui suivrait elle me dit toute souriante: « je ne t’ai pas vu au catéchisme ce jeudi, tu étais souffrant? » Je laissais à ma mère le soin de répondre. Puis elle me demanda : »tu travailles bien à l’école, tu es combien? » Pas le temps de répondre que je ressentais une vive douleur dans le creux du bras. Elle avait planté son aiguille et je voyais la seringue (6) qui se remplissait de mon sang. « Voilà! c’est fini » me dit-elle en posant un coton à l’endroit de la piqûre pour éponger la goutte (2) qui pointait à la surface. Elle vida sa seringue dans un tube (1) et satisfaite d’elle-même, me dit: « tu as été très sage, tiens voilà un bonbon ». « Merci ,ma soeur » balbutiais-je et lui tournais le dos prêt à me sauver.
Je crois bien qu’en effet j’avais été très sage car ma mère en sortant me paya un pouce-pouce.